« La politique est un jeu sale », dit-on souvent. Mais au Cameroun, elle est devenue aujourd’hui un champ de bataille entre la fidélité et la soif de changement. Et au centre de cette tension se trouve un homme : Issa Tchiroma Bakary, figure bien connue de la scène politique, ancien ministre et compagnon de longue date du président Paul Biya.
Pendant plus de 25 ans, Tchiroma a défendu avec ferveur le régime du Rassemblement Démocratique du Peuple Camerounais (RDPC). Il a été la voix du pouvoir, le bouclier médiatique du système. Mais aujourd’hui, le ton a changé. Celui qu’on surnommait autrefois le « fidèle lieutenant » du président est devenu la voix la plus bruyante du désaccord et du renouveau.
Une rupture historique
Lors de ses récents rassemblements politiques, les foules se font de plus en plus nombreuses. Les chants de soutien se mêlent à ceux de la colère, traduisant une lassitude nationale après 43 ans de pouvoir ininterrompu.
Et pour la première fois, Issa Tchiroma ose défier le chef de l’État :
« Le Cameroun ne peut pas être dirigé par procuration. Gouverner par délégation est illégal et inacceptable », a-t-il déclaré.
Il accuse Paul Biya de confisquer le pouvoir et de refuser de préparer sa succession, malgré son âge avancé et les appels répétés à un renouvellement politique.
Le dilemme du pouvoir
Cette nouvelle posture de Tchiroma soulève plusieurs interrogations :
Paul Biya peut-il encore faire confiance à son ancien porte-voix pour défendre le régime ?
Issa Tchiroma incarne-t-il réellement l’alternative, ou joue-t-il une carte stratégique pour capitaliser sur la fatigue du peuple ?
Dans un pays où les alliances politiques se font et se défont au gré des intérêts, la loyauté devient une notion fragile. Mais cette fois, la fracture semble profonde, presque irréversible.
Le risque du silence présidentiel
Alors que les Camerounais se préparent à voter, un détail intrigue : le silence prolongé de Paul Biya. Le président n’a jusqu’ici participé à aucun grand meeting, laissant ses partisans défendre son bilan à sa place.
Or, ce retrait de la scène politique pourrait se retourner contre lui. Si Tchiroma continue à galvaniser les foules, le pays pourrait connaître une contestation sans précédent en cas de victoire du RDPC.
Un verdict électoral perçu comme injuste pourrait plonger le Cameroun dans une crise politique majeure.
Une année charnière
Quoi qu’il advienne, 2025 marquera un tournant décisif dans l’histoire politique du Cameroun.
Le peuple semble prêt à faire entendre sa voix, à réclamer plus de justice, plus de transparence, et surtout, plus de changement.
De Yaoundé à Maroua, de Douala à Bamenda, une certitude s’impose :
Le Cameroun d’après 2025 ne sera plus jamais le même.
Dr. David Makongo
Analyste politique et défenseur du changement démocratique

